Tempête Alex : les pluies torrentielles peuvent-elles déclencher une hausse de l’activité sismique ?
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Publié le 10 juillet 2024–Mis à jour le 15 juillet 2024
Date(s)
le 10 juillet 2024
Des chercheurs du laboratoire GEOAZUR (Université Côte d’Azur, Observatoire de la Côte d’Azur, CNRS, IRD) et du laboratoire GEGENAA de l’Université de Reims Champagne-Ardenne ont publié une
étude dans la revue Earth and Space Science de l’American Geophysical Union en juin 2024, mettant en
évidence une interaction entre fluides et glissement asismique dans le déclenchement et le maintien
d’une activité sismique consécutive d’un phénomène météorologique extrême.
Le 2 octobre 2020, le département des Alpes Maritimes, dans le sud-est de la France a été frappé par la tempête Alex. Les précipitations, d’une intensité sans précédent, ont atteint près de 600 mm en moins de 24 heures, provoquant de nombreuses crues et glissements de terrains, entrainant d’importants dégâts humains et matériels. Les vallées au nord de Nice (Vésubie, Roya, Tinée) ont été particulièrement touchées.
Une augmentation significative de l’activité sismique
Fait inhabituel, dans la vallée de la Tinée, les stations du réseau sismologique français Epos-France (consortium coordonné par le CNRS), enregistrant en moyenne trois séismes par mois de magnitude supérieure à 0.4, ont détecté une augmentation significative de l’activité sismique dans les jours suivant la tempête Alex (23 séismes en octobre). L’étude approfondie des signaux continus des stations sismologiques à proximité a permis d’identifier 188 séismes de magnitudes variant de -1 à 2 entre octobre et décembre 2020. Ces séismes sont organisés en essaims entre 3 et 4 km de profondeur. Un des essaims sismiques observés présente notamment une migration bidirectionnelle à double vitesse, un indicateur de la multiplicité des processus physiques à l’œuvre.
Pour identifier les mécanismes impliqués dans le déclenchement et le maintien de la sismicité, des modélisations hydromécaniques ont été réalisées. Vu le court délai entre le phénomène météorologique extrême et la survenue des séismes, l’équipe a exploré l’impact des ajouts et retraits de masse en surface, causés respectivement par la crue massive et les multiples glissements de terrain, ainsi que la contribution d’un front de pression de fluide dans la croûte. Un dernier mécanisme transitoire, le glissement asismique récemment révélé par l’analyse des essaims sismiques, a également été introduit.
Une nouvelle perspective dans le déclenchement des séismes
Les résultats montrent que les perturbations de contraintes causées par les glissements de terrain ou la crue en surface sont négligeables à la profondeur à laquelle la sismicité se produit. De plus, l’analyse révèle que les variations de contraintes générées par la diffusion de fluides depuis la surface n’expliquent à elles seules qu’environ 2% de la sismicité observée (soit 4 séismes sur les 188 recensés). Un troisième modèle, basé sur des séquences de glissements asismiques sous forme d’impulsions de durée et d’amplitude variables, a permis de reproduire parfaitement l’évolution temporelle de la sismicité observée dans la Tinée durant cette période. Leurs résultats montrent que l’augmentation de pression de fluides dans les failles crustales à la suite de la tempête Alex a tout d’abord entrainé une déformation asismique. Les perturbations intermittentes de contraintes associées à ces glissements asismiques sur les failles sont ensuite suffisantes pour déclencher des essaims sismiques.
Pour en savoir plus :
Jacquemond, L., Godano, M., Cappa, F., Larroque, C. (2024), Interplay between fluid intrusion and aseismic stress perturbations in the onset of earthquake swarms following the 2020 Alex extreme rainstorm. Earth and Space Science, 11, e2024EA003528. https://doi.org/10.1029/2024EA003528
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