UCA news donne la parole aux doctorants sous un format libre. Pour cette édition retrouvez Morgane Le Rolle, doctorante à l’Institut de Biologie Valrose qui présente "L’étude de la voie de signalisation Wnt/βcaténine au cours de l’ovogenèse".
Ce texte a été réalisé dans la perspective de la finale azuréenne du concours “Ma Thèse en 180 secondes”.
Depuis des travaux scientifiques des années 60, on a coutume de penser que c’est le fait d’avoir reçu de notre père soit le chromosome Y, soit le chromosome X. Car, en effet, notre mère, elle, ne nous transmettra jamais qu’un chromosome X…
Mais qu’est-ce qui fait qu’à partir de là, nous développons soit des testicules, soit des ovaires ?
Lors de la formation d’un bébé qui possède le chromosome Y, un gène mâle amené par ce chromosome va s’activer et activer une ribambelle de gènes, un peu à l’image d’un programme informatique, qui va donner les ordres aux cellules pour donner un garçon. Avec des testicules donc !
De là, il était facile de penser que le développement femelle ne pouvait se faire que par défaut, du fait de l’absence du fameux chromosome Y.
Heureusement, il y a une dizaine d’années, un cas est venu remettre en question cette théorie (un brin sexiste) sur la différenciation sexuelle. Dans une famille italienne, des individus XX, donc sans chromosome Y, s’étaient développés… en hommes ! Cela montre bien que devenir une femme, c’est également tout un programme. Ce qui a de quoi mettre du baume au cœur à la moitié XX de l’humanité.
Donc remise en question, je veux dire revirement de sexe !
Dans la foulée, on a découvert un gène qui n’est pas du tout porté sur un chromosome sexuel, mais qui est situé sur le chromosome 1.
Mon laboratoire d’accueil a été le premier à générer une souris mutante, chez qui ce fameux gène est inactif.
Ce sont des mutantes de laboratoire. Ont-elles des super pouvoirs ?
Et bien pour le coup, je peux vous annoncer que oui, ce sont vraiment des super souris.
Ces petites souris mutantes sont remarquables, car conformément à nos attentes, elles changent de sexe.
Elles possèdent une jolie paire de testicules, exactement comme dans la famille Italienne.
(Désolée j’ai pas choisie la famille ! Mais parfois j’aimerais vraiment changer de sexe)
Poursuivons le raisonnement …
Grace à ces souris au sexe inversé, on est en train de décrypter le programme femelle ! Enfin !
On a pu mettre en évidence un autre gène, β-caténine.
Le gène que j’étudie au cours de ma thèse. C’est un peu mon gène.
Mais pourquoi ?
En France, 1 couple sur 4 consulte pour des problèmes de fertilité. Et à ce jour, encore 20% des cas d’infertilité restent inexpliqués.
Donc j’étudie au cours de ma thèse …la suite d’action qui fait que se forme un ovaire et les ovules qu’il contient. Tout disfonctionnement dans la formation des ovules peut entrainer des problèmes de fertilité et des cancers des ovaires. Avec mes souris mutantes, j’ai pu découvrir que β-caténine est un peu le chef de file qui dit aux futurs ovules de se multiplier afin d’atteindre le bon nombre à la naissance. L’absence de ce gène pourrait expliquer certains cas d’infertilités.
Il semblerait aussi que dans les cancers ovariens, mon gène revienne faire la loi pour dire aux ovules, alors devenus des cellules cancéreuses, de se multiplier encore plus vite.
Pour continuer dans cette voie …sexuelle :
Finalement, nous ne sommes pas si différents. Un seul gène peut faire pencher la balance entre les deux sexes.
Alors je cherche, Je travaille,
Mais je suis loin d’avoir fini …
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